Publié le 15 mars 2024

Contrairement à l’idée reçue, se reconnecter à la nature n’est pas une question de destination, mais une compétence d’observation qui se cultive.

  • Apprendre à lire l’environnement (reconnaître arbres, plantes et traces) transforme une simple balade en dialogue.
  • Pratiquer l’immersion sensorielle et l’immobilité (via des techniques comme le « sit spot ») amplifie la connexion et ses bienfaits physiologiques.

Recommandation : Commencez par choisir un seul arbre près de chez vous et apprenez à le reconnaître en utilisant tous vos sens. C’est le premier pas pour passer de spectateur à habitant.

Pour beaucoup de citadins, le besoin de nature se manifeste comme un appel diffus, une envie de « vert » pour apaiser un stress grandissant. On se dit qu’il faut « sortir plus », « faire une randonnée », mais une fois en forêt, le sentiment de déconnexion persiste. L’environnement reste une toile de fond, une belle « masse verte » indistincte que l’on traverse sans vraiment la voir. On consomme un paysage comme on regarde une carte postale, puis on rentre, avec l’impression d’être passé à côté de l’essentiel, sans savoir nommer quoi.

Les conseils habituels se concentrent sur l’action : marcher, bouger, respirer. Mais ils omettent la compétence fondamentale qui change tout. Et si le secret n’était pas d’aller *dans* la nature, mais de comprendre que nous *sommes* la nature ? Si la véritable clé n’était pas dans le mouvement, mais dans l’immobilité attentive ? L’enjeu n’est pas de multiplier les activités, mais de transformer notre perception. Il s’agit d’apprendre la grammaire de notre environnement pour passer du statut de spectateur passif à celui d’habitant actif et conscient.

Cet article n’est pas une liste de destinations, mais un guide d’apprentissage. Il vous donnera des clés pratiques et sensorielles pour déchiffrer le monde naturel qui vous entoure, que ce soit une forêt, un parc ou votre propre jardin. De la reconnaissance de vos premiers arbres à l’art de l’affût, en passant par le décryptage des traces animales, vous découvrirez comment chaque sortie peut devenir une conversation profonde et une source inépuisable d’émerveillement et de bien-être.

Pour vous guider dans cette transformation perceptive, ce guide est structuré en étapes progressives. Chaque section vous dévoilera une pratique spécifique pour aiguiser vos sens et approfondir votre lien avec le monde vivant.

La forêt n’est plus une masse verte : comment apprendre à reconnaître vos 5 premiers arbres et changer votre regard à jamais

Le premier pas pour sortir de la perception passive de la nature est d’apprendre à nommer ce que l’on voit. Tant qu’une forêt n’est qu’une « masse verte », il est impossible d’y tisser un lien intime. Apprendre à identifier ne serait-ce que cinq arbres communs transforme radicalement l’expérience. Le paysage cesse d’être un décor pour devenir une communauté d’individus, chacun avec son histoire, sa texture et son caractère. Le chêne n’est plus « un arbre », mais ce chêne précis, avec son écorce rugueuse et ses feuilles lobées. Cette reconnaissance est la base de la grammaire de la nature.

L’identification ne se limite pas à la vue. C’est une démarche multi-sensorielle. Il faut toucher l’écorce, froisser une feuille pour en sentir l’odeur, écouter le bruit du vent dans ses branches. Ce faisant, on active des zones du cerveau liées à la mémoire et à l’émotion, créant un ancrage bien plus puissant qu’une simple reconnaissance visuelle. En France, ce patrimoine vivant est célébré à travers des individus exceptionnels, comme le démontre la labellisation des Arbres remarquables de France, qui met en lumière des spécimens centenaires au cœur de notre histoire culturelle, à l’image du chêne de Saint-Jean en forêt de Compiègne, âgé de près de 800 ans.

Pour débuter, concentrez-vous sur des espèces faciles à distinguer. Le tilleul, par exemple, se reconnaît à son écorce d’abord lisse puis crevassée et à sa feuille en forme de cœur. Le marronnier, lui, se trahit par ses fruits caractéristiques, les « bogues » épineuses. Pour bien visualiser cette approche tactile, l’image ci-dessous montre l’importance d’explorer la texture.

Détail en macro d'une main touchant délicatement l'écorce crevassée d'un vieux chêne

Comme on peut le voir, le contact direct avec l’écorce révèle un monde de détails inaccessibles au seul regard. C’est par cette exploration sensorielle que l’on commence à dialoguer avec l’arbre. Chaque espèce possède une signature tactile, olfactive et même sonore unique.

Votre plan d’action : Identifier vos 5 premiers arbres

  1. Observer l’écorce : Notez sa couleur et sa texture. Est-elle lisse comme celle du jeune tilleul, ou profondément crevassée comme celle du chêne ?
  2. Examiner les feuilles : Observez leur forme (cœur pour le tilleul), leur bord, et les détails comme les touffes de poils sous la feuille qui distinguent les espèces de tilleuls.
  3. Identifier les fruits : Les bogues du marronnier, les samares de l’érable ou les glands du chêne sont des signatures uniques. Attention à ne pas confondre les marrons (non comestibles) avec les châtaignes.
  4. Repérer la floraison : Les fleurs odorantes du tilleul en mai ou les chatons du noisetier en hiver sont des indices saisonniers précieux.
  5. Analyser le port de l’arbre : Sa silhouette générale est un bon indice. Le tilleul a des branches larges qui lui donnent un aspect majestueux, tandis que le peuplier est élancé.

En pratiquant cette observation active, vous ne verrez plus jamais une forêt de la même manière. Chaque arbre deviendra une connaissance, un repère, un ami. La « masse verte » se peuplera de visages familiers, et votre promenade se transformera en une visite à une communauté que vous connaissez personnellement.

Le rendez-vous secret qui va changer votre vie : l’art et la science du « sit spot » pour vous reconnecter profondément à la nature

Si la reconnaissance des arbres est la première lettre de l’alphabet de la nature, la pratique du « sit spot » en est la poésie. Le concept est d’une simplicité désarmante : choisir un lieu accessible dans la nature, même un simple coin de parc ou un jardin, et s’y asseoir en silence et en observation, régulièrement, pour une durée de 15 à 20 minutes. Ce n’est pas une méditation au sens strict, mais un acte d’immersion sensorielle. L’objectif n’est pas de « faire le vide », mais au contraire de « faire le plein » : de sons, d’odeurs, de mouvements, de lumière.

La puissance de cette pratique réside dans la répétition. En revenant au même endroit jour après jour, on tisse une relation intime avec lui. On commence à remarquer les changements subtils : l’arrivée d’une nouvelle fleur, le passage d’un oiseau particulier, la variation de la lumière selon l’heure. Le cerveau, habitué à un flux constant de stimuli nouveaux, apprend à se calibrer sur un rythme plus lent, plus organique. C’est un entraînement à l’attention profonde qui a des effets physiologiques mesurables. La science de l’écothérapie confirme ces bienfaits : une étude anglaise a démontré qu’après une simple balade, on observe une baisse de 71% du niveau de dépression chez les participants.

Pour mettre en place votre « sit spot », suivez un protocole simple mais structuré, qui vous aidera à construire l’habitude sur la durée.

  • Jours 1-3 : Le choix du lieu. Trouvez un endroit où vous vous sentez en sécurité et à l’aise. Cela peut être sous un arbre, près d’un ruisseau ou même sur votre balcon si vous y avez une vue sur un peu de végétation. Vérifiez qu’il n’y a pas de dangers évidents (branches mortes, etc.).
  • Jours 4-7 : L’établissement de la routine. L’important est la régularité. Essayez d’y retourner chaque jour, même pour 5 minutes. Prenez simplement le temps de vous installer confortablement.
  • Jours 8-14 : Le développement de l’observation. Que voyez-vous ? Que sentez-vous ? Quels sont les sons les plus proches et les plus lointains ? Soyez un récepteur passif, sans jugement.
  • Jours 15-21 : L’approfondissement de la connexion. Après votre séance, prenez 10 minutes pour écrire ou dessiner ce que vous avez remarqué. Ce travail de restitution ancre l’expérience et affine votre capacité d’observation pour les fois suivantes.

Au fil des semaines, votre « sit spot » deviendra un sanctuaire personnel, un point d’ancrage dans le cycle des saisons. Les animaux, s’habituant à votre présence calme, se montreront plus facilement. Vous ne serez plus un intrus, mais une partie intégrante du paysage, un voisin silencieux dans le grand quartier du vivant.

Arrêtez de marcher, laissez-vous porter : comment la randonnée en pleine conscience peut transformer une simple balade en méditation

Nous marchons souvent en mode « pilote automatique », l’esprit occupé par des pensées, le corps réduit à un simple moyen de transport d’un point A à un point B. La randonnée en pleine conscience propose une rupture radicale avec cette habitude. Elle invite à transformer la marche en une méditation en mouvement, où chaque pas, chaque respiration, chaque sensation devient un objet d’attention. L’objectif n’est plus la destination, mais l’expérience même du cheminement.

Cette approche contemplative est au cœur de certaines initiatives en France, comme celle du centre d’initiation à la nature d’Auberive, au sein du parc national des forêts de Champagne et Bourgogne. Leur credo est de « vivre dans la nature, s’en imprégner, la comprendre », en proposant par exemple des itinérances au rythme lent des ânes. C’est l’antithèse de la randonnée-performance. Une technique particulièrement efficace pour y parvenir est la marche afghane, qui synchronise la respiration sur le rythme des pas. Cette méthode simple mais puissante ancre l’esprit dans le corps et le corps dans le moment présent, calmant le flot des pensées.

L’adaptation du rythme respiratoire au terrain est cruciale pour maintenir un état de fluidité et d’aisance. Le tableau suivant propose une adaptation pratique de la marche afghane aux différents types de sentiers que l’on trouve en France, comme le suggèrent des organismes spécialisés dans les voyages nature comme Escursia qui propose des séjours axés sur l’observation.

Adaptation de la marche afghane aux topographies françaises
Type de terrain Rythme respiratoire Exemples de sentiers Dénivelé journalier
Sentiers côtiers plats 3 pas inspiration / 3 pas expiration GR34 en Bretagne 0 à 200m max
Moyenne montagne 2 pas inspiration / 3 pas expiration Sentiers des Vosges 200 à 400m
Haute montagne 2 pas inspiration / 4 pas expiration Alpes, Pyrénées 400 à 1000m

En pratiquant cette synchronisation, vous remarquerez que votre effort physique diminue, votre esprit s’apaise, et vos sens s’ouvrent à l’environnement. Vous commencerez à sentir la texture du sol sous vos pieds, à percevoir le parfum de la terre humide après la pluie, à entendre le chant d’un oiseau que votre bruit intérieur aurait masqué.

La randonnée devient alors moins une conquête de kilomètres qu’une dissolution dans le paysage. Vous ne traversez plus la forêt, c’est la forêt qui vous traverse, à chaque inspiration. Chaque balade, même la plus courte, se transforme en une opportunité de se recentrer et de se nourrir de la beauté simple du monde.

Les 3 super-plantes de votre jardin que vous prenez pour des mauvaises herbes : le mini-guide du cueilleur débutant

La reconnexion à la nature commence souvent juste sous nos pieds, dans ces plantes que l’on qualifie à tort de « mauvaises herbes ». Apprendre à identifier et à utiliser quelques-unes de ces plantes bio-indicatrices est une étape fascinante. Non seulement elles sont souvent comestibles ou médicinales, mais elles nous racontent aussi l’histoire du sol sur lequel elles poussent. Elles sont une porte d’entrée vers une compréhension plus profonde des écosystèmes, même les plus modestes comme une pelouse de jardin.

Trois de ces « super-plantes » sont omniprésentes en France et constituent un excellent point de départ pour le cueilleur débutant. Elles sont faciles à reconnaître et leurs usages sont multiples. Il est cependant crucial de respecter quelques règles de base pour une cueillette durable et sûre : ne jamais prélever plus d’un tiers de la plante pour assurer sa régénération, et s’assurer de l’absence de pollution dans la zone de cueillette. Voici un mini-guide pour débuter :

  • Le pissenlit : Loin d’être un simple envahisseur de pelouse, le pissenlit indique un sol riche et souvent tassé. Ses jeunes feuilles, récoltées au printemps avant la floraison, sont délicieuses en salade et riches en vitamines.
  • Le plantain : Cette plante qui résiste au piétinement révèle un sol compact. Ses feuilles fraîches, une fois écrasées, constituent un remède de premier secours remarquable pour apaiser les piqûres d’insectes.
  • L’ortie : Sa présence signale un sol très riche en azote. Cueillies avec des gants, ses jeunes pousses sont un trésor nutritionnel. En soupe, en quiche ou en tisane, elles offrent un apport exceptionnel en minéraux.

Avant de vous lancer, il est indispensable de connaître la législation. En France, la cueillette est une pratique encadrée, notamment dans les espaces protégés et les forêts domaniales, où elle est souvent tolérée pour un usage familial mais peut être restreinte par des arrêtés locaux. Il est également essentiel de ne jamais cueillir une espèce protégée.

En intégrant ces quelques plantes dans votre quotidien, vous ne regarderez plus jamais votre jardin ou le bord d’un chemin de la même façon. Chaque « mauvaise herbe » deviendra une ressource potentielle, une pharmacie à ciel ouvert et une source de nourriture. C’est un pas de plus pour passer de consommateur de nature à partenaire de l’écosystème.

Une nuit dehors peut changer votre perception du monde : le guide pour votre premier bivouac en toute sécurité

Passer une nuit dehors est une expérience transformative. Loin de la pollution lumineuse et sonore des villes, nos sens se réveillent. L’ouïe s’aiguise pour capter les bruits de la faune nocturne, la vue s’habitue à l’obscurité pour révéler la splendeur d’un ciel étoilé. Le bivouac n’est pas qu’une question de dormir à la belle étoile ; c’est une immersion totale qui recalibre notre horloge biologique et notre rapport au monde. Pourtant, l’idée peut intimider. La peur du froid, de l’inconnu ou des petites bêtes est un frein courant. La clé est d’y aller progressivement.

Une bonne stratégie est de commencer par des « micro-bivouacs » pour s’habituer au matériel et aux sensations. Une nuit dans son jardin ou même sur son balcon est une excellente première étape. Cela permet de tester son sac de couchage, de se familiariser avec les bruits nocturnes dans un environnement sécurisé, avant de se lancer dans la « vraie » nature. Ce n’est qu’ensuite que l’on peut envisager une nuit dans un camping puis un bivouac autorisé dans un parc naturel.

L’image d’une tente illuminée sous les étoiles est une puissante invitation à l’aventure. Elle symbolise ce cocon de chaleur et de sécurité au cœur de l’immensité sauvage.

Tente illuminée de l'intérieur sous un ciel étoilé dans un alpage de montagne

En France, le bivouac est réglementé. Il est généralement interdit en dehors des zones spécifiquement autorisées. De nombreux parcs nationaux et régionaux le tolèrent sous conditions, souvent du coucher au lever du soleil. La Réserve naturelle des Hauts-Plateaux du Vercors est un excellent exemple, comme le rapportent des guides spécialisés comme Explora Project qui détaille les spots de bivouac en France. Le bivouac y est toléré entre 17h et 9h, offrant une opportunité unique d’observer la faune alpine dans le respect des lieux. La sécurité passe aussi par le bon sens : évitez de vous installer au pied d’une falaise ou à proximité de troupeaux.

Votre premier bivouac réussi vous laissera un souvenir impérissable. Vous réaliserez que la nuit n’est pas une absence de lumière, mais un autre monde, vibrant de vie. Cette expérience simple et profonde renforce la confiance en soi et crée un lien indélébile avec la nature sauvage.

La nature est le plus beau des coffres à jouets : 10 jeux à inventer avec ce que vous trouverez en promenade

Redécouvrir son âme d’enfant est l’une des voies les plus directes pour se reconnecter à la nature. En abandonnant la posture sérieuse de l’adulte, on s’autorise à jouer, à créer, à expérimenter avec ce que l’environnement nous offre. Feuilles, cailloux, branches, pommes de pin… La nature est un coffre à jouets infini et gratuit, pour peu qu’on laisse libre cours à son imagination. Cette approche ludique est un excellent moyen de partager la nature en famille, mais elle est tout aussi puissante en solitaire pour réveiller sa créativité.

Le Land Art, qui consiste à créer des œuvres éphémères avec des éléments naturels, est une pratique simple et profonde. Un mandala de feuilles colorées, une sculpture de galets en équilibre… Ces créations ne demandent aucune compétence technique, juste de l’attention et de la patience. Voici quelques idées pour transformer une simple promenade en atelier créatif à ciel ouvert :

  • Créer des mandalas avec tout ce que vous trouvez : galets, feuilles, marrons, morceaux de bois.
  • Fabriquer un sifflet avec une branche de noisetier fraîchement coupée.
  • Jouer aux osselets avec des noyaux d’abricots ou des petits cailloux polis.
  • Construire un mobile naturel avec une branche et des éléments suspendus.
  • Organiser une course de bateaux en écorce dans un ruisseau.
  • Fabriquer des pinceaux avec des herbes et des brindilles pour peindre avec de la boue.

Cette démarche ludique peut même mener à des réflexions plus profondes sur le biomimétisme : l’art d’observer la nature pour s’en inspirer dans nos propres créations. L’exemple le plus célèbre est celui du TGV japonais Shinkansen, dont le nez a été redessiné en s’inspirant du bec du martin-pêcheur pour être plus silencieux. Observer une graine d’érable tournoyer comme un hélicoptère ou une pomme de pin s’ouvrir et se fermer avec l’humidité sont des leçons de design et d’ingénierie offertes par la nature.

En adoptant cette posture de jeu, on cesse de voir la nature comme un simple décor. Chaque élément devient une possibilité, un matériau, une source d’inspiration. La forêt se transforme en atelier, la plage en toile, et la promenade en une chasse au trésor permanente.

Le journal qui vous apprend à voir : une page par jour pour redécouvrir la nature qui vous entoure

« Le monde est plein de choses évidentes que personne ne remarque jamais », disait Sherlock Holmes. Pour apprendre à remarquer, l’un des outils les plus puissants est le journal de nature. Tenir un carnet où l’on consigne ses observations, même les plus modestes, est un exercice qui discipline le regard et aiguise l’attention. Il ne s’agit pas de produire une œuvre d’art, mais d’utiliser le dessin et l’écriture comme des outils pour apprendre à voir plus profondément.

Cette pratique s’inscrit dans la lignée des grands naturalistes français comme Buffon ou Jean-Henri Fabre. Leurs carnets, remplis de dessins détaillés et d’annotations précises, n’étaient pas de simples albums, mais de véritables instruments de recherche. Ils dessinaient la même branche chaque semaine pour noter son évolution ou détaillaient les nervures d’une seule feuille pour en comprendre la structure. Cette méthode est toujours d’une pertinence absolue. En forçant notre cerveau à traduire une observation en un trait de crayon ou en un mot, nous l’obligeons à analyser les détails, les formes, les textures et les couleurs que nous aurions autrement ignorés.

Pour commencer votre propre journal phénologique (qui étudie l’apparition d’événements périodiques dans la nature), il est utile de suivre une structure qui guide l’observation :

  • Avoir un focus : Pour ne pas vous disperser, choisissez un sujet pour votre séance d’observation. Cela peut être un type de plante, les oiseaux, ou simplement tout ce qui se passe dans votre « sit spot ».
  • S’asseoir immobile : Comme pour le « sit spot », l’immobilité permet à la faune de s’habituer à votre présence et à votre esprit de se calmer. C’est un prérequis pour une observation de qualité.
  • Utiliser des jumelles : Des jumelles, même modestes, sont la loupe du naturaliste. Elles révèlent les détails d’un plumage ou le comportement d’un insecte sur une fleur.
  • Comparer des observations : Le cerveau humain est particulièrement doué pour remarquer les différences. Dessinez deux feuilles similaires côte à côte, et vous en verrez les spécificités bien plus clairement.
  • Regarder de plus près : N’hésitez pas à vous concentrer sur le minuscule. L’organisation d’une colonie de fourmis ou la structure d’une mousse est un univers en soi.

Avec le temps, votre journal deviendra bien plus qu’une collection de dessins. Il sera le témoignage de votre relation grandissante avec la nature, une carte personnelle des saisons, et la preuve tangible que le monde qui vous entoure est infiniment plus riche et complexe que vous ne l’aviez jamais imaginé.

À retenir

  • La reconnexion authentique exige de passer d’une vision globale (« la masse verte ») à une attention portée aux détails (identifier un arbre, une plante).
  • L’immobilité et le silence sont des outils puissants. Des pratiques comme le « sit spot » permettent de devenir une partie du paysage plutôt qu’un intrus.
  • L’observation active est une compétence qui se cultive, que ce soit par le jeu, la tenue d’un journal ou l’apprentissage de la lecture des traces laissées par les animaux.

Vous ne voyez que 10% de ce que vous regardez : le guide pour réveiller le Sherlock Holmes qui sommeille en vous

Une fois que nos sens sont aiguisés par la pratique du journal ou du « sit spot », nous pouvons nous lancer dans une discipline fascinante : l’archéologie du présent. Chaque mètre carré de sol forestier est un livre ouvert qui raconte les événements des dernières 24 heures. Une plume de geai près de poils de renard, des empreintes fraîches dans la rosée, une pomme de pin rongée… Ce sont les indices d’une vie intense qui se déroule juste sous nos yeux, mais que nous ne savons plus lire. Apprendre à déchiffrer ces signes, c’est réveiller le pisteur, le détective qui sommeille en nous.

C’est une compétence qui se développe par l’observation et la connaissance. En compagnie d’un guide expérimenté, par exemple lors d’un séjour ornithologique, on apprend à reconstituer les déplacements nocturnes de la faune, à identifier qui a mangé quoi, ou qui est passé par là. Le sol devient une scène de crime ou de vie, où chaque trace est une pièce du puzzle. L’expérience est d’autant plus forte lorsque l’on bivouaque sur place, le confort rudimentaire rendant l’immersion totale et l’observation plus aiguisée.

Pour commencer à développer votre « regard de détective », il est utile d’avoir un guide mental des principaux signes de présence des animaux les plus communs en France. Ce tableau synthétise les indices clés à rechercher pour cinq animaux emblématiques de nos forêts.

Guide d’identification des signes de présence des 5 animaux communs en France
Animal Empreintes Laissées/Crottes Traces d’alimentation Autres indices
Chevreuil 2 sabots en cœur (5-6cm) Petites crottes noires en tas Écorce rongée à 1m de hauteur Couches dans herbes hautes, aboiements rauques
Renard 4 doigts alignés (5cm) Crottes torsadées avec poils/os Trous creusés pour mulots Forte odeur musquée, terriers à entrées multiples
Sanglier 2 sabots + ergots latéraux Amas volumineux informe Sol retourné (boutis) Bauges de boue, frottis sur arbres
Écureuil 5 doigts devant, 4 derrière Petites crottes rondes Pommes de pin rongées en fuseau Nids sphériques (hottes) dans fourches d’arbres
Pic-vert 2 doigts avant, 2 arrière Fientes blanches liquides Trous rectangulaires dans troncs Tambourinages sonores, cris stridents ‘kiak-kiak’

Pour devenir un véritable enquêteur de la nature, il est essentiel de maîtriser les bases de l'identification des indices et de pratiquer sans cesse.

En vous armant de ces connaissances, votre prochaine promenade se transformera en une enquête passionnante. Vous ne marcherez plus simplement sur un sentier, vous suivrez les pistes laissées par les habitants discrets de la forêt, reconstruisant le fil de leurs histoires. C’est l’étape ultime de la reconnexion : non seulement vous êtes présent dans la nature, mais vous comprenez ce qui s’y passe en votre absence.

Questions fréquentes sur la cueillette sauvage et la reconnexion à la nature en France

Puis-je cueillir librement dans une forêt domaniale?

La cueillette est généralement tolérée pour un usage familial dans les forêts domaniales, comme le précise des guides sur la reconnaissance des plantes. La limite est souvent fixée à 5 litres par personne et par jour (l’équivalent d’un panier). Cependant, un arrêté préfectoral ou municipal peut toujours restreindre ou interdire la cueillette pour protéger certaines espèces ou zones, il est donc prudent de se renseigner localement.

Quelle est la différence entre domaine public et privé pour la cueillette?

La règle est simple : sur un terrain privé, l’autorisation du propriétaire est toujours obligatoire pour cueillir quoi que ce soit. Cueillir sans autorisation est considéré comme un vol. Sur le domaine public (forêts domaniales, chemins communaux), la cueillette à caractère familial est généralement tolérée, sauf réglementation contraire.

Comment consulter les listes d’espèces protégées?

Il est formellement interdit de cueillir des espèces végétales protégées. Chaque région a sa propre liste. Pour la consulter, le plus simple est de se rapprocher de la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) de votre région. Leurs sites internet publient généralement les listes à jour des espèces protégées.

Rédigé par Hélène Leclerc, Hélène Leclerc est sophrologue et coach en préparation mentale depuis plus de 10 ans, spécialisée dans la gestion du stress et l'optimisation de la concentration. Elle traduit les apports des neurosciences en outils pratiques pour le quotidien.